En direct de la Russie, Edward Snowden est l'invité en visio-conférence de cette conférence sur la société de surveillance qui s'est tenue le 6 décembre 2018 à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Organisée par les associations étudiantes "Débattre en Sorbonne" et "Alliance Panthéon-Sorbonne", cette conférence a également réuni William Bourdon (avocat au barreau de Paris), Paul Cassia (professeur d'université en droit à Paris 1), Judith Rochfeld (professeur d'université en droit à Paris 1) et Patrick Weil (directeur de recherche au CNRS). 

A l'occasion de cette conférence, Edward Snowden a pu être honoré pour avoir révélé en 2013 les méthodes de surveillance illégales des services de renseignement américains, en particulier de la NSA. Ses révélations ont eu effectivement des conséquences juridiques et politiques importantes dans tout le monde. "La technologie de surveillance a dépassé notre capacité à la contrôler démocratiquement" affirme-t-il. Il souligne également les dangers de la collecte massive de données et les risques d'abus de la part des gouvernements et des entreprises. Il critique le manque de transparence et de responsabilité des entreprises technologiques telles que Facebook et les implications de leurs pratiques en matière de collecte de données. Il s'inquiète de l'utilisation d'outils de surveillance par des régimes autoritaires et des risques de violation des droits de l'homme. Il met l'accent sur l'importance de la protection de la vie privée et la nécessité d'une réglementation plus stricte des technologies de surveillance.

Les révélations de Snowden ont mis en évidence l'insuffisance des protections juridiques existantes pour les lanceurs d'alerte. Un cadre juridique international amélioré est nécessaire pour mieux protéger celles et ceux qui révèlent des informations dans l'intérêt public. Or, les lanceurs d'alerte qui exposent des actes répréhensibles commis par des institutions puissantes font souvent l'objet de représailles et il est nécessaire de disposer d'une plateforme internationale neutre pour évaluer l'intérêt public de leurs actions. 

Il explique également l'importance de l'esprit critique à savoir, ne pas croire aveuglément tout ce que nous lisons, en particulier face à la désinformation et à l'abus de pouvoir. Les individus ont la responsabilité de défendre ce en quoi ils croient, même si cela implique de prendre des risques et de défier des entités puissantes. Il se penche sur le dilemme que représente le fait de travailler pour des entreprises comme Google et Facebook, qui offrent de grandes possibilités mais ne sont pas forcément respectueuses de la vie privée, et donne un aperçu de sa propre expérience à la CIA et à la NSA. Les individus doivent être conscients des risques liés au fait de travailler pour de grandes entreprises susceptibles de modifier leurs valeurs et doivent protéger et défendre leurs valeurs s'ils choisissent de travailler pour de telles organisations. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) de l'Union européenne doit être appliqué de manière plus stricte, notamment en prévoyant des sanctions maximales pour les grandes entreprises qui violent agressivement les droits des personnes.

Edward Snowden soutient par ailleurs que la presse devrait avoir une certaine latitude dans une société libre et ouverte parce qu'elle représente l'institution la plus expérimentée dans l'influence de jugements sur l'intérêt public. Il encourage aussi les individus à prendre des risques et à faire la différence, même s'ils risquent leur propre sécurité ou confort. Il met en garde contre les dangers de laisser les institutions puissantes accumuler trop de pouvoir et prône la réforme ou la révolution comme réponses nécessaires pour éviter les tragédies.

Il exprime ensuite sa gratitude pour l'intérêt que les gens portent à sa sécurité, mais souligne qu'il croit en la nécessité de prendre des risques pour avoir un impact positif sur le monde. Malgré les accusations portées contre lui, Edward Snowden reste considéré comme un symbole de liberté et de résistance contre l’oppression et la société de surveillance.